Samarkand
À l’affût du moindre souffle, Sarah guettait l’improbable résurrection d’une ferveur chez Léo. Ensemble ils avaient parcouru la première moitié du chemin. La journée est bien entamée, disait-il, on a fait la partie ensoleillée du trajet. Maintenant on dirait que ça s’assombrit à l’horizon. Doit être facile 16 ou 17 heures dans notre vie. Sarah, elle, espérait encore un peu. Elle lui parlait d’autres rêveries, lui promettait un bonheur neuf. T’en fais pas, j’ai des rêves pour deux, disait-elle. Notre temps reviendra. On retrouvera la foi et les miracles. Ils sont jamais bien loin. C’est par hasard qu’on les découvre, en jouant avec la vie. Elle choisissait ses mots avec soin, forçait sur l’enthousiasme. On est encore des enfants, Léo, c’est pour ça qu’on s’en sortira ! Tu verras, on a encore de beaux jours devant nous ! Elle aimait quand un sourire finalement illuminait son visage. Lui se reprochait de ne pas être assez attentif à la vie présente avec elle. Par habitude et par facilité il trouvait refuge dans son imaginaire. Il imaginait des villes au nom imprononçable, des azurs orientalisés, des trips capables de les inventer morts et ressuscités (toujours ce fantasme de la renaissance), voltigeant main dans la main au-dessus des toits de Samarkand, vers les hautes montagnes. Ils planaient sans effort et la rapidité de leur vol les emportait au-delà des territoires de survie.